Page:Verne - Famille-sans-nom, Hetzel, 1889.djvu/56

Le texte de cette page a été corrigé et est conforme au fac-similé.

larges rues, bordées de riches magasins et entretenues avec soin par l’édilité montréalaise. Arrivé devant l’hôtel de la banque, il dit à Lionel de l’attendre dans le vestibule, se rendit à la caisse centrale, revint au bout d’un quart d’heure, et se dirigea vers le bureau de la voiture publique.

Cette voiture était un de ces stages à deux chevaux qu’on appelle « buggies, » en langage canadien. Ces sortes de chars à bancs, suspendus sur des ressorts, doux si l’on veut, mais solides très certainement, sont construits en vue de résister à la dureté des routes. Ils peuvent contenir une demi-douzaine de voyageurs.

« Eh ! c’est monsieur Nick ! s’écria le conducteur du stage, d’aussi loin qu’il aperçut le notaire, toujours et partout accueilli par cette cordiale exclamation.

— Moi-même, en compagnie de mon clerc ! répondit maître Nick du ton de bonne humeur qui lui était habituel.

— Vous vous portez bien, monsieur Nick ?

— Oui, Tom, et tâchez de vous porter aussi bien que moi !… Vous ne vous ruinerez pas en médecines !…

— Ni en médecins, répondit Tom.

— Quand partons-nous ? demanda maître Nick.

— À l’instant.

— Est-ce que nous avons des compagnons de route ?

— Personne encore, répliqua Tom, mais il en viendra, peut-être, au dernier moment…

— Je le souhaite… je le souhaite, Tom ! J’aime à pouvoir causer en route, et, pour causer, j’ai observé qu’il est indispensable de ne pas être seul ! »

Cependant il était probable que les désirs naïvement exprimés de maître Nick ne seraient point satisfaits, cette fois. Les chevaux étaient attelés, Tom faisait claquer son fouet, et aucun voyageur ne se présentait au bureau.

Le notaire prit donc place dans le stage sur le banc du fond, que Lionel vint aussitôt occuper près de lui. Un dernier coup d’œil