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C’était maintenant l’heure des représailles. Le gouvernement métropolitain allait procéder avec une énergie si impitoyable qu’elle touchait à la cruauté.

Le 4 novembre, sir John Colborne, alors investi de l’autorité supérieure, avait proclamé la loi martiale et suspendu l’habeas corpus dans toute la province. La Cour martiale ayant été constituée, ses jugements furent rendus avec une partialité et même une légèreté révoltante. Cette cour envoya à l’échafaud Cardinal, Duquet, Robert, Hamelin, les deux Sanguinet, Decoigne, Narbonne, Nicolas, Lorimier, Hindelang et Daunais, dont les noms ne s’effaceront jamais du martyrologue de l’histoire franco-canadienne.

À ces noms, il convient de joindre ceux de quelques-uns des personnages qui ont figuré dans cette histoire, l’avocat Sébastien Gramont, puis Vincent Hodge, qui mourut comme était mort son père, avec le même courage et pour la même cause.

William Clerc, ayant succombé à ses blessures sur la terre américaine, André Farran, qui s’était réfugié aux États-Unis, survécut seul à ses compagnons.

Puis vint la liste des exilés. Elle comprit cinquante-huit des patriotes les plus marquants, et bien des années devaient s’écouler avant qu’ils pussent rentrer dans leur patrie.

Quant au député Papineau, l’homme politique, dont la personnalité avait dominé toute cette période de revendications nationales, il parvint à s’échapper. Une longue existence lui a permis de voir le Canada en possession de son autonomie, sinon de sa complète indépendance. Papineau est mort dernièrement aux limites d’une vieillesse justement honorée.

Il reste à dire ce qu’est devenue Catherine Harcher. De ses cinq fils, qui avaient accompagné leur père à Saint-Charles et à l’île Navy, deux seulement revinrent à la ferme de Chipogan, après quelques années d’exil, et, depuis cette époque, ils ne l’ont plus quittée.

Quant aux Mahogannis, qui avaient pris part au dénouement de