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Schlosser, les Anglais étaient cantonnés dans le village de Chippewa, sous les ordres du colonel Mac Nab. Leur effectif était assez important pour écraser les réformistes rassemblés sur l’île Navy, s’ils parvenaient à y opérer une descente. Aussi de larges bateaux avaient-ils été réunis à Chippewa en vue de ce débarquement, qui serait tenté dès que les préparatifs du colonel Mac Nab auraient pris fin, c’est-à-dire dans quelques jours. L’issue de cette dernière campagne sur les confins du Canada, en présence des Américains, était donc imminente.

On ne s’étonnera pas que les personnages qui ont plus spécialement figuré dans les diverses phases de cette histoire, se fussent retrouvés à l’île Navy. André Farran, récemment guéri de sa blessure, ainsi que William Clerc, étaient accourus au camp, où Vincent Hodge ne tarda pas à les rejoindre. Seul, le député Sébastien Gramont, alors détenu dans la prison de Montréal, n’occupait pas son rang parmi ses frères d’armes.

Après avoir assuré la retraite de Bridget et de Clary de Vaudreuil qui, grâce à son intervention, avaient pu atteindre Maison-Close, Vincent Hodge était parvenu à se dégager des soldats ivres qui l’entouraient et de ceux qui menaçaient de lui couper la route. De là, il s’était jeté à travers la forêt, et, au lever du jour, il ne courait plus le danger de tomber entre les mains des royaux. Quarante-huit heures plus tard, il atteignait Saint-Albans, au delà de la frontière. Lorsque le camp de l’île Navy eut été organisé, il s’y transporta avec quelques Américains, qui s’étaient donnés corps et âme à la cause de l’indépendance.

Là étaient aussi Thomas Harcher et quatre de ses fils, Pierre, Tony, Jacques et Michel. Après avoir échappé au désastre de Saint-Charles, retourner à Chipogan eût été non seulement se compromettre, mais compromettre Catherine Harcher. Ils s’étaient donc réfugiés au village de Saint-Albans, où Catherine avait pu les rassurer par message sur son sort et sur celui des autres enfants. Puis, dès la première semaine de décembre, ils étaient venus s’enfermer dans l’île