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Alors Joann se releva, il regarda une dernière fois cet autre lui-même, auquel le crime de leur père avait fait comme à lui une vie si misérable !

Puis, il murmura ces mots :

« Mon Dieu, venez-moi en aide ! »

Le temps lui était trop sévèrement mesuré pour qu’il pût en perdre, ne fût-ce que quelques minutes. Il posa sa main sur l’épaule de Jean. Jean se réveilla, ouvrit les yeux, se redressa, reconnut son frère et s’écria :

« Toi, Joann !…

— Plus bas… Jean… Parle plus bas ! répondit Joann. On peut nous entendre ! »

Et, de la main, il lui fit signe que la porte était gardée extérieurement.

Les pas du sergent s’éloignaient et se rapprochaient tour à tour le long du couloir.

Jean, à demi habillé sous une couverture grossière, qui ne le protégeait que bien imparfaitement contre le froid de la cellule, se leva sans bruit.

Les deux frères s’embrassèrent longuement.

Puis, Jean dit :

« Notre mère ?…

— Elle n’est plus à Maison-Close !

— Elle n’y est plus ?…

— Non !

— Et M. de Vaudreuil et sa fille, auxquels notre maison avait donné asile ?…

— La maison était vide, lorsque je suis retourné dernièrement à Saint-Charles !

— Quand ?…

— Il y a sept jours !

— Et depuis, tu n’as rien su de notre mère, de nos amis ?

— Rien ! »