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Au lointain, à peine quelques lumières brillaient-elles aux fenêtres des premières habitations de la bourgade, alors plongée dans un repos que ne troublait aucune rumeur.

Fallait-il en conclure que la nouvelle de la défaite de Saint-Charles n’était pas encore arrivée à Saint-Denis ?

C’est ce que pensa Bridget. Clary de Vaudreuil ne devait donc rien savoir de ce désastre, et ce serait par elle, messagère de malheur, qu’elle allait tout apprendre.

Bridget monta les marches du petit escalier, à l’angle de la maison, et frappa à la porte.

La réponse se fit attendre.

Bridget frappa de nouveau.

Des pas résonnèrent à l’intérieur d’un vestibule, qui s’éclaira faiblement. Puis une voix demanda :

« Que voulez-vous ?…

— Voir le juge Froment.

— Le juge Froment n’est pas à Saint-Denis, et, en son absence, je ne puis ouvrir.

— J’ai de graves nouvelles à lui communiquer, reprit Bridget en insistant.

— Vous les lui communiquerez à son retour ! »

La détermination de ne point ouvrir paraissait si formelle, que Bridget n’hésita pas à se servir du nom de Clary.

« Si le juge Froment n’est pas chez lui, dit-elle, Mlle de Vaudreuil doit y être, et il faut que je lui parle.

Mlle de Vaudreuil est partie, fut-il répondu, non sans une certaine hésitation.

— Elle est partie ?…

— Depuis hier…

— Et savez-vous où elle est allée ?…

— Sans doute… elle aura voulu rejoindre son père !

— Son père ?… répondit Bridget. Eh bien ! c’est de la part de M. de Vaudreuil que je viens la chercher !