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l’exécration publique ! Un Simon Morgaz, c’est le traître qui a livré ses frères et vendu son pays.

Et on le comprendra, surtout dans cette France, qui n’ignore plus « maintenant » combien sont implacables les haines que mérite le crime de lèse-patrie.

En 1825 — douze ans avant l’insurrection de 1837 — quelques Franco-Canadiens avaient jeté les bases d’une conspiration, dont le but était de soustraire le Canada à la domination anglaise, qui lui pesait si lourdement. Hommes audacieux, actifs, énergiques, de grande situation, issus pour la plupart des premiers émigrants qui avaient fondé la Nouvelle-France, ils ne pouvaient se faire à cette pensée que l’abandon de leur colonie au profit de l’Angleterre fût définitif. En admettant même que le pays ne dût pas revenir aux petits-fils des Cartier et des Champlain, qui l’avaient découvert au XVIe siècle, n’avait-il pas le droit d’être indépendant ? Sans doute, et c’était pour lui conquérir son indépendance que ces patriotes allaient jouer leur tête.

Parmi eux se trouvait M. de Vaudreuil, descendant des anciens gouverneurs du Canada sous Louis XIV — une de ces familles dont les noms français sont devenus pour la plupart les noms géographiques de la cartographie canadienne.

À cette époque, M. de Vaudreuil avait trente-cinq ans, étant né en 1790, dans le comté de Vaudreuil, situé entre le Saint-Laurent au sud, et la rivière Outaouais au nord, sur les confins de la province de l’Ontario.

Les amis de M. de Vaudreuil étaient, comme lui, d’origine française, bien que des alliances successives avec les familles anglo-américaines eussent altéré leurs noms patronymiques.

Tels le professeur Robert Farran, de Montréal, François Clerc, un riche propriétaire de Châteauguay, et quelques autres, auxquels leur naissance ou leur fortune assuraient une réelle influence sur la population des bourgades et des campagnes.

Le véritable chef du complot était Walter Hodge, de nationalité