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— Ils vous défendraient, répondit vivement Clary, ils se feraient tuer pour vous !

— Je le sais, dit Jean, et alors, pour prix de l’hospitalité qu’ils m’ont donnée, je laisserais après moi la ruine et le malheur ! Thomas Harcher et ses enfants, contraints de s’enfuir pour avoir pris ma défense !… Et jusqu’où n’iraient pas les représailles !… Aussi, ai-je hâte d’avoir quitté la ferme !

— Pourquoi ne reviendriez-vous pas secrètement à la villa Montcalm ? dit alors M. de Vaudreuil. Les risques que vous voulez épargner à Thomas Harcher, n’est-il pas de mon devoir de m’y exposer, et je suis prêt à le remplir ! Dans mon habitation, le secret de votre retraite sera bien gardé !

— Cette proposition, monsieur de Vaudreuil, répondit Jean, mademoiselle votre fille me l’a déjà faite en votre nom, mais j’ai dû refuser.

— Cependant, reprit M. de Vaudreuil en insistant, ce serait très utile pour les dernières mesures que vous avez à prendre. Vous pourriez chaque jour communiquer avec les membres du comité. À l’heure du soulèvement, Farran, Clerc, Vincent Hodge, moi, nous serions prêts à vous suivre. N’est-il pas probable que le premier mouvement se produira dans le comté de Montréal ?

— C’est probable, en effet, répondit Jean, ou tout au moins dans un des comtés voisins, suivant les positions qui seront occupées par les troupes royales.

— Eh bien, dit Clary, pourquoi ne pas accepter la proposition de mon père ? Votre intention est-elle donc de parcourir encore les paroisses du district ? N’avez-vous point achevé votre campagne de propagande ?

— Elle est achevée, répondit Jean ; je n’ai plus qu’à donner le signal…

— Qu’attendez-vous donc pour le faire ? demanda alors M. de Vaudreuil.

— J’attends une circonstance, qui achèvera d’exaspérer les pa-