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palissades, hautes d’une douzaine de pieds. Une seule porte, solidement encastrée dans ses montants de pierre, y donnait accès. Excellente précaution au temps peu reculé où les attaques des indigènes étaient à craindre. Maintenant les Indiens vivent en bonne intelligence avec la population des campagnes. Et même, à deux lieues dans l’est, au village de Walhatta, prospérait la tribu huronne des Mahogannis, qui rendaient parfois visite à Thomas Harcher, afin d’échanger les produits de leurs chasses contre les produits de la ferme.

Le principal bâtiment se composait d’une large construction à deux étages, un quadrilatère régulier, comprenant le nombre de chambres nécessaires au logement de la famille Harcher. Une vaste salle occupait la plus grande partie du rez-de-chaussée, entre la cuisine et l’office d’un côté, et, de l’autre, l’appartement spécialement réservé au fermier, à sa femme et aux plus jeunes de ses enfants.

En retour, sur la cour ménagée devant l’habitation, et, par derrière, sur le jardin potager, les communs faisaient équerre en s’appuyant aux palissades de l’enceinte. Là s’élevaient les écuries, les étables, les remises, les magasins. Puis, c’étaient les basses-cours, où pullulaient ces lapins d’Amérique, dont la peau, divisée en lanières tissées, sert à la confection d’une étoffe extrêmement chaude, et ces poules de prairie, ces phasianelles, qui se multiplient plus abondamment à l’état domestique qu’à l’état sauvage.

La grande salle du rez-de-chaussée était simplement, mais confortablement garnie de meubles de fabrication américaine. C’est là que la famille déjeunait, dînait, passait les soirées. Agréable lieu de réunion pour les Harcher de tout âge, qui aimaient à se retrouver ensemble, lorsque les occupations quotidiennes avaient pris fin. Aussi on ne s’étonnera pas qu’une bibliothèque de livres usuels y tint la première place, et que la seconde fût occupée par un piano, sur lequel, chaque dimanche, filles ou garçons jouaient avec entrain les valses et quadrilles français qu’ils dansaient tour à tour.

L’exploitation de cette terre exigeait évidemment un assez nombreux personnel. Mais Thomas Harcher l’avait trouvé dans sa propre