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le comte d'artigas.

promettre une somme si énorme qu’elle fût.

« Combien… combien ?… répétait-il.

— Dix millions de dollars, répondit Gaydon.

— Dix millions ?… s’écria Thomas Roch. Dix millions… un Fulgurateur dont la puissance est dix millions de fois supérieure à tout ce qu’on a fait jusqu’ici ?… Dix millions… un projectile autopropulsif qui peut, en éclatant, étendre sa puissance destructive sur dix mille mètres carrés !… Dix millions… le seul déflagrateur capable de provoquer son explosion !… Mais toutes les richesses du monde ne suffiraient pas à payer le secret de mon engin, et plutôt que de le livrer à ce prix, je me couperais la langue avec les dents !… Dix millions, quand cela vaut un milliard… un milliard… un milliard !… »

Thomas Roch se montrait bien l’homme auquel toute notion des choses faisait défaut, lorsqu’il s’agissait de traiter avec lui. Et, lors même que Gaydon lui eût offert dix milliards, cet insensé en aurait exigé davantage.

Le comte d’Artigas et le capitaine Spade n’avaient cessé de l’observer depuis le début de cette crise, — le comte, toujours flegmatique, bien que son front se fût rembruni, — le capitaine secouant la tête en