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face au drapeau

La folie commune, lorsqu’elle n’est pas incurable, ne saurait être guérie que par des moyens moraux. La médecine et la thérapeutique y sont impuissantes, et leur inefficacité est depuis longtemps reconnue des spécialistes. Ces moyens moraux étaient-ils applicables au cas de Thomas Roch ? il était permis d’en douter, même en ce milieu tranquille et salubre de Healthful-House. En effet, l’inquiétude, les changements d’humeur, l’irritabilité, les bizarreries de caractère, la tristesse, l’apathie, la répugnance aux occupations sérieuses ou aux plaisirs, ces divers symptômes apparaissaient nettement. Aucun médecin n’aurait pu s’y méprendre, aucun traitement ne semblait capable de les guérir ni de les atténuer.

On a justement dit que la folie est un excès de subjectivité, c’est-à-dire un état où l’âme accorde trop à son labeur intérieur, et pas assez aux impressions du dehors. Chez Thomas Roch, cette indifférence était à peu près absolue. Il ne vivait qu’en dedans de lui-même, en proie à une idée fixe dont l’obsession l’avait amené là où il en était. Se produirait-il une circonstance, un contrecoup qui « l’extérioriserait », pour employer un mot assez exact,