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deux ans de vacances.

de s’entr’ouvrir, et l’abri qu’il offrait à cette heure finirait par devenir insuffisant. Mais, d’ici là, ou les jeunes naufragés auraient pu gagner quelque ville, quelque village, ou, si la tempête les avait relégués sur une île déserte, ils auraient découvert une grotte dans les rochers du littoral.

Le mieux était donc de demeurer provisoirement à bord du Sloughi. C’est ce qui fut fait le jour même. Une échelle de corde, établie sur tribord, du côté où le yacht donnait la bande, permit aux grands comme aux petits d’atteindre les capots du pont. Moko, qui savait un peu de cuisine, en sa qualité de mousse et aidé de Service, qui se plaisait à fricoter, s’occupa de préparer un repas. Tous mangèrent de bon appétit, et même Jenkins, Iverson, Dole et Costar s’abandonnèrent à quelque gaîté. Seul, Jacques Briant, autrefois le boute-en-train du pensionnat, continua de se tenir à l’écart. Un tel changement dans son caractère, dans ses habitudes, était bien fait pour surprendre ; mais Jacques, devenu très taciturne, s’était toujours dérobé aux questions que ses camarades lui avaient faites à ce sujet.

Enfin, très fatigués, après tant de jours, tant de nuits, passés au milieu des mille dangers de la tempête, tous ne songèrent plus qu’à dormir. Les petits se répartirent dans les chambres du yacht, où les grands ne tardèrent pas à les rejoindre. Toutefois, Briant, Gordon et Doniphan voulurent veiller à tour de rôle. Ne pouvaient-ils craindre l’apparition d’une bande de fauves, ou même d’une troupe d’indigènes qui n’eussent pas été moins redoutables ? Il n’en fut rien. La nuit s’écoula sans alertes, et, lorsque le soleil reparut, après une prière de reconnaissance envers Dieu, on s’occupa des travaux exigés par les circonstances.

Premièrement, il fallut inventorier les provisions du yacht, puis le matériel, comprenant armes, instruments, ustensiles, vêtements, outils, etc. La question de la nourriture était la plus grave, puisque cette côte semblait déserte. Les ressources y seraient bornées aux produits de la pêche et de la chasse, si, toutefois, le gibier ne