Page:Verne - Deux Ans de vacances, Hetzel, 1909.djvu/59

Cette page a été validée par deux contributeurs.
51
deux ans de vacances.

rayon de plusieurs milles, Briant et Gordon revinrent vers le Sloughi.

Doniphan et quelques autres allaient et venaient sur les roches, tandis que Jenkins, Iverson, Dole et Costar s’amusaient à ramasser des coquillages.

Dans un entretien qu’ils eurent avec les grands, Briant et Gordon firent connaître le résultat de leur exploration. En attendant que les investigations pussent être portées plus loin, il parut convenable de ne point abandonner le schooner. Bien qu’il fût fracassé dans ses fonds et qu’il donnât une forte bande à bâbord, il pourrait servir de demeure provisoire, à cette place même où il s’était échoué. Si le pont s’était entr’ouvert à l’avant, au-dessus du poste de l’équipage, le salon et les chambres de l’arrière offraient, du moins, un abri suffisant contre les rafales. Quant à la cuisine, elle n’avait point souffert du talonnement sur les récifs – à la grande satisfaction des petits, que la question des repas intéressait tout particulièrement.

En vérité, c’était une chance que ces jeunes garçons n’eussent point été réduits à transporter sur la grève les objets indispensables à leur installation. En admettant qu’ils y eussent réussi, à quelles difficultés, à quelles fatigues, n’auraient-ils point été exposés ? Si le Sloughi fût resté à l’accore des premiers brisants, comment auraient-ils pu opérer le sauvetage du matériel ? La mer n’eût-elle pas rapidement démoli le yacht, et, des quelques épaves éparses sur le sable, conserves, armes, munitions, vêtements, literie, ustensiles de toutes sortes, si utiles à l’existence de ce petit monde, qu’aurait-on pu sauver ? Heureusement, le raz de marée avait jeté le Sloughi au-delà du banc de récifs. S’il se trouvait hors d’état de jamais naviguer, du moins était-il habitable, puisque ses hauts avaient résisté à la bourrasque d’abord, au choc ensuite, et que rien ne pourrait l’arracher de cette souille sablonneuse, où sa quille s’était enfoncée. Sans doute, sous les atteintes successives du soleil et de la pluie, il finirait par se disloquer, son bordé céderait, son pont achèverait