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deux ans de vacances.

Une nuit noire enveloppait le port et le golfe Hauraki. Le vent de terre se faisait sentir avec force, et le schooner, pris en dessous par un courant de reflux qui portait au large, se mit à fuir vers la haute mer.

Lorsque le mousse se réveilla, le Sloughi roulait comme s’il eût été bercé par une houle qu’on ne pouvait confondre avec le ressac habituel. Moko se hâta aussitôt de monter sur le pont… Le yacht était en dérive !

Aux cris du mousse, Gordon, Briant, Doniphan et quelques autres, se jetant à bas de leurs couchettes, s’élancèrent hors du capot. Vainement appelèrent-ils à leur aide ! Ils n’apercevaient même plus une seule des lumières de la ville ou du port. Le schooner était déjà en plein golfe, à trois milles de la côte.

Tout d’abord, sur les conseils de Briant auquel se joignit le mousse, ces jeunes garçons essayèrent d’établir une voile, afin de revenir au port en courant une bordée. Mais, trop lourde pour pouvoir être orientée convenablement, cette voile n’eut d’autre effet que de les entraîner plus loin par la prise qu’elle donnait au vent d’ouest. Le Sloughi doubla le cap Colville, franchit le détroit qui le sépare de l’île de la Grande-Barrière, et se trouva bientôt à plusieurs milles de la Nouvelle-Zélande.

On comprend la gravité d’une pareille situation. Briant et ses camarades ne pouvaient plus espérer aucun secours de terre. Au cas où quelque navire du port se mettrait à leur recherche, plusieurs heures se passeraient avant qu’il eût pu les rejoindre, étant même admis qu’il fût possible de retrouver le schooner au milieu de cette profonde obscurité. Et d’ailleurs, le jour venu, comment apercevrait-on un si petit bâtiment, perdu sur la haute mer ? Quant à se tirer d’affaire par leurs seuls efforts, comment ces enfants y parviendraient-ils ? Si le vent ne changeait pas, ils devraient renoncer à revenir vers la terre.

Restait, il est vrai, la chance d’être rencontré par un bâtiment faisant route vers un des ports de la Nouvelle-Zélande. C’est pourquoi,