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deux ans de vacances.

Tels sont les jeunes garçons que la tempête venait de jeter sur une des terres de l’Océan Pacifique.

Pendant cette promenade de quelques semaines le long des côtes de la Nouvelle-Zélande, le Sloughi devait être commandé par son propriétaire, le père de Garnett, l’un des plus hardis yachtmen des parages de l’Australasie. Que de fois le schooner avait paru sur le littoral de la Nouvelle-Calédonie, de la Nouvelle-Hollande, depuis le détroit de Torrès jusqu’aux pointes méridionales de la Tasmanie, et jusque dans ces mers des Moluques, des Philippines et des Célèbes, si funestes parfois aux bâtiments du plus fort tonnage ! Mais c’était un yacht solidement construit, très marin, et qui tenait admirablement la mer, même par les gros temps.

L’équipage se composait d’un maître, de six matelots, d’un cuisinier et d’un mousse, — Moko, jeune nègre de douze ans, dont la famille était depuis longtemps au service d’un colon de la Nouvelle-Zélande. Il faut mentionner aussi un beau chien de chasse, Phann, de race américaine, qui appartenait à Gordon et ne quittait jamais son maître.

Le jour du départ avait été fixé au 15 février. En attendant, le Sloughi restait amarré par l’arrière à l’extrémité du Commercial-pier, et conséquemment, assez au large dans le port.

L’équipage n’était pas à bord, lorsque, le 14 au soir, les jeunes passagers vinrent s’embarquer. Le capitaine Garnett ne devait arriver qu’au moment de l’appareillage. Seuls, le maître et le mousse reçurent Gordon et ses camarades, – les hommes étant allés vider un dernier verre de whisky. Et même, après que tous furent installés et couchés, le maître crut pouvoir rejoindre son équipage dans un des cabarets du port, où il eut le tort impardonnable de s’attarder jusqu’à une heure avancée de la nuit. Quant au mousse, il s’était affalé dans le poste pour dormir.

Que se passa-t-il alors ? Très probablement, on ne devait jamais le savoir. Ce qui est certain, c’est que l’amarre du yacht fut détachée par négligence ou par malveillance… À bord on ne s’aperçut de rien.