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deux ans de vacances.

le méritaient, — Moko, pour son coup de canon, tiré si à propos à travers l’embrasure de Store-room, — Jacques, pour le sang-froid dont il avait fait preuve en déchargeant son revolver sur Walston, — Costar enfin qui « en aurait bien fait autant, dit-il, s’il avait eu un pistolet ! » Mais il n’en avait pas !

Il n’y eut pas jusqu’à Phann auquel revint sa bonne part de caresses, sans compter un stock d’os à moelle dont Moko le gratifia pour avoir attaqué à coups de crocs ce coquin de Brandt qui entraînait le petit garçon.

Il va sans dire que Briant, après le coup de canon de Moko, était revenu en toute hâte vers l’endroit où ses camarades gardaient la civière. Quelques minutes après, Doniphan avait été déposé dans le hall, sans avoir repris connaissance, tandis que Forbes, relevé par Evans, était étendu sur la couchette de Store-room. Pendant toute la nuit, Kate, Gordon, Briant, Wilcox et le master veillèrent près des deux blessés.

Que Doniphan eût été atteint très gravement, ce n’était que trop visible. Toutefois, comme il respirait assez régulièrement, il fallait que le poumon n’eût point été perforé par le coutelas de Cope. Pour panser sa blessure, Kate eut recours à certaines feuilles dont on fait communément usage au Far-West, et que fournirent quelques arbrisseaux des bords du rio Zealand. C’étaient des feuilles d’aunes, lesquelles, froissées et disposées en compresses, sont très efficaces pour empêcher la suppuration interne, car tout le danger était là. Mais il n’en fut pas ainsi de Forbes que Walston avait atteint au ventre. Il se savait frappé à mort, et, lorsqu’il reprit connaissance, pendant que Kate, penchée sur sa couchette, lui donnait ses soins :

« Merci, bonne Kate ! merci !… murmura-t-il. C’est inutile !… Je suis perdu ! »

Et des larmes coulaient de ses yeux.

Le remords avait-il donc remué ce qu’il y avait encore de bon dans le cœur de ce malheureux ?… Oui ! Entraîné surtout par les mauvais conseils et le mauvais exemple, s’il avait pris part aux