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deux ans de vacances.

ramener Briant à bord, avant qu’une trop longue immersion ne l’eût asphyxié.

En moins d’une minute, Briant fut rehissé sur le pont – sans connaissance, il est vrai ; mais il revint promptement à lui dans les bras de son frère.

La tentative, ayant pour but d’établir un câble à la surface du banc de récifs, avait échoué. Nul n’eût pu la reprendre avec quelque chance de succès. Ces malheureux enfants en étaient donc réduits à attendre… Attendre quoi ?… Un secours ?… Et de quel côté, et par qui aurait-il pu leur venir !

Il était plus de midi alors. La marée se faisait déjà sentir, et le ressac s’accroissait. Et même, comme c’était nouvelle lune, le flot allait être plus fort que la veille. Aussi, pour peu que le vent retombât du côté du large, le schooner risquerait-il d’être soulevé de son lit de roches… Il talonnerait de nouveau, il serait chaviré à la surface du récif !… Personne ne survivrait à ce dénouement du naufrage ! Et rien à faire, rien !

Tous, à l’arrière, les petits entourés par les grands, regardaient la mer qui se gonflait, à mesure que les têtes de roches disparaissaient l’une après l’autre. Par malheur, le vent était revenu à l’ouest, et, comme la nuit précédente, il battait de plein fouet la terre. Avec l’eau plus profonde, les lames, plus hautes, couvraient le Sloughi de leurs embruns et ne tarderaient pas à déferler contre lui. Dieu seul pouvait venir en aide aux jeunes naufragés. Leurs prières se mêlèrent à leurs cris d’épouvante.

Un peu avant deux heures, le schooner, redressé par la marée, ne donnait plus la bande sur bâbord ; mais, par suite du tangage, l’avant heurtait contre le fond, tandis qu’à l’arrière son étambot restait encore fixé au lit de roches. Bientôt les coups de talon se succédèrent sans relâche, et le Sloughi roula d’un bord sur l’autre. Les enfants durent se retenir les uns aux autres pour ne pas être jetés par-dessus le bord.

En ce moment, une montagne écumante venant de la haute mer,