Page:Verne - Deux Ans de vacances, Hetzel, 1909.djvu/316

Cette page a été validée par deux contributeurs.
298
deux ans de vacances.

elle fut recouverte d’un épais prélart, afin que la sécheresse n’en fît pas disjoindre les coutures. Puis, Baxter et Wilcox tendirent des collets près de l’enclos, et creusèrent de nouvelles fosses sur la lisière de Traps-woods. Enfin, les fleurons furent dressés le long de la rive gauche du rio Zealand, de manière à retenir dans leurs mailles le gibier d’eau que les violentes brises du sud entraîneraient vers l’intérieur de l’île.

Entre temps, Doniphan et deux ou trois de ses camarades, montés sur leurs échasses, faisaient des excursions sur les South-moors, d’où ils ne revenaient jamais « bredouilles », tout en ménageant leurs coups de fusil, car, au sujet des munitions, Briant se montrait aussi économe que Gordon.

Pendant les premiers jours de juillet, le rio commença à se prendre. Les quelques glaçons qui se formèrent sur le Family-lake, dérivèrent au fil du courant. Bientôt, par suite de leur accumulation un peu en aval de French-den, une embâcle s’entassa, et la surface du cours d’eau n’offrit plus qu’une épaisse croûte glacée. Avec le maintien du froid, marqué déjà par une douzaine de degrés au-dessous du zéro centigrade, le lac ne tarderait pas à se solidifier sur toute son étendue. En effet, après un violent assaut de rafales qui rendit cette solidification plus lente, le vent hala le sud-est, le ciel s’éclaircit, et la température s’abaissa à près de vingt degrés au-dessous du chiffre de congélation.

Le programme de la vie hivernale fut repris dans les conditions où il avait été établi l’année précédente. Briant y tenait la main, sans chercher à faire abus de son autorité. On lui obéissait volontiers, d’ailleurs, et Gordon facilitait beaucoup sa tâche en donnant l’exemple de l’obéissance. Au surplus, Doniphan et ses partisans ne se mirent jamais en état d’insubordination. Ils s’occupaient du service quotidien des trappes, pièges, fleurons et collets, qui leur était plus spécialement attribué, tout en continuant de vivre entre eux, causant à voix basse, ne se mêlant que très rarement à la conversation générale, même pendant les repas, même pendant les veillées du soir. Préparaient-ils