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deux ans de vacances.

Cependant on sentait qu’il était devenu moins communicatif et que lui aussi, à l’exemple de son frère, montrait une propension à se tenir à l’écart. Gordon, en constatant ce changement de caractère, observa aussi que Briant cherchait à mettre Jacques en avant, dans toutes les occasions où il y avait quelque courage à déployer, quelque danger à courir – ce que Jacques acceptait d’ailleurs avec empressement. Toutefois, comme Briant ne dit jamais rien qui pût engager Gordon à l’interroger à ce sujet, celui-ci se tint sur la réserve, bien qu’il fût porté à croire qu’une explication avait dû avoir lieu entre les deux frères.

Le mois de février s’écoula en travaux de diverses sortes. Wilcox ayant signalé une remontée de saumons vers les eaux douces du Family-lake, on en prit un certain nombre au moyen de filets tendus d’une rive à l’autre du rio Zealand. La nécessité de les conserver exigeait que l’on se procurât une assez grande quantité de sel. Cela occasionna plusieurs voyages à Sloughi-bay, où Baxter et Briant établirent un petit marais salant – simple carré, ménagé entre les plis du sable, et dans lequel se déposait le sel, après que les eaux de la mer s’étaient évaporées sous l’action des rayons solaires.

Pendant la première quinzaine de mars, trois ou quatre des jeunes colons purent explorer une partie de cette contrée marécageuse des South-moors, qui s’étendait sur la rive gauche du rio Zealand. C’est à Doniphan que vint l’idée de cette exploration, et Baxter, d’après son conseil, fabriqua quelques paires d’échasses, en utilisant de légers espars pour cet usage. Comme le marécage était en certains endroits recouvert d’une mince couche d’eau, ces échasses permettraient de s’aventurer à pied sec jusqu’aux surfaces solides.

Le 17 avril, dès le matin, Doniphan, Webb et Wilcox, ayant traversé le rio dans la yole, débarquèrent sur la rive gauche. Ils portaient leurs fusils en bandoulière. Et même Doniphan s’était armé de la canardière que possédait l’arsenal de French-den, pensant qu’il aurait là une excellente occasion de s’en servir.