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deux ans de vacances.

l’extrême horizon de cette vaste baie. Développée sur un secteur de quinze milles environ, entre deux pointes sablonneuses, elle eût mérité le nom de golfe.

En ce moment, cette baie était déserte – comme toujours, sans doute. Pas un navire en vue, même à son périmètre, nettement découpé sur le fond du ciel ! De terre ou d’île, pas même l’apparence ! Moko, habitué à reconnaître ces vagues linéaments des hauteurs lointaines qui se confondent souvent avec les vapeurs du large, ne découvrit rien avec la lunette. L’île Chairman semblait être aussi isolée dans les parages de l’est que dans ceux de l’ouest. Et voilà pourquoi la carte du naufragé français n’indiquait aucune terre en cette direction.

Dire que Briant fut très désappointé, ce serait exagérer. Non ! Il s’attendait bien à cela. Aussi, trouva-t-il tout simple de donner à cette échancrure de la côte la dénomination de Deception-bay (baie Déception).

« Allons, dit-il, ce n’est pas encore de ce côté que nous pourrons prendre la route du retour !

— Eh, monsieur Briant, répondit Moko, on s’en va toujours, que ce soit par un chemin ou par un autre ! En attendant, je pense que nous ferons bien de déjeuner…

— Soit, répondit Briant, et faisons vite. – À quelle heure la yole pourra-t-elle remonter l’East-river ?

— Si nous voulions profiter de la marée, il faudrait s’embarquer à l’instant.

— C’est impossible, Moko ! Je tiens à observer l’horizon dans des conditions plus favorables, et du haut de quelque roche qui domine la grève.

— Alors, monsieur Briant, nous serons forcés d’attendre la marée prochaine, qui ne se fera pas sentir dans l’East-river avant dix heures du soir.

— Est-ce que tu ne craindras pas de naviguer pendant la nuit ? demanda Briant.

— Non, et je le ferai sans danger, répondit Moko, car nous aurons