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deux ans de vacances.

d’eau, comme si elle eût été en pleine mer, la surface du lac étant circonscrite par une ligne périphérique de ciel. Jacques regardait attentivement dans la direction de l’est, pour voir si la côte n’apparaissait pas à l’opposé de French-den.

Vers trois heures, le mousse, ayant pris la lunette, put affirmer qu’il reconnaissait des indices de terre. Un peu plus tard, Briant constata que Moko n’avait point fait erreur. À quatre heures, des têtes d’arbres se montraient au-dessus d’une rive assez basse – ce qui expliquait pourquoi, du sommet de False-Sea-point, Briant n’avait pu l’apercevoir. Ainsi, l’île Chairman ne renfermait pas d’autres hauteurs que celles d’Auckland-hill, qui l’accidentaient entre Sloughi-bay et Family-lake.

Encore deux milles et demi à trois milles, et la rive orientale serait atteinte. Briant et Moko maniaient leurs avirons avec ardeur, non sans quelque fatigue, car la chaleur était forte. La surface du lac était unie comme un miroir. Le plus souvent, ses eaux, très claires, en laissaient voir à douze ou quinze pieds le fond hérissé d’herbes aquatiques, entre lesquelles se jouaient des myriades de poissons.

Enfin, vers six heures du soir, la yole vint atterrir au pied d’une berge, au-dessus de laquelle se penchait l’épaisse ramure des chênes-verts et des pins maritimes. Cette berge, assez élevée, ne se prêtait guère à un débarquement, et on dut la suivre pendant un demi-mille, à peu près, en remontant vers le nord.

« Voilà le rio porté sur la carte, » dit alors Briant.

Et il montrait un évasement de la rive, par laquelle s’écoulait le trop plein des eaux du lac.

« Eh bien, je crois que nous ne pouvons nous dispenser de lui donner un nom, répondit le mousse.

— Tu as raison, Moko. Appelons-le l’East-river, puisqu’il coule à l’orient de l’île.

— Parfait, dit Moko, et, maintenant, nous n’avons plus qu’à prendre le courant de l’East-river et à le descendre pour atteindre son embouchure.