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deux ans de vacances.

vraient de faim, les yeux se fermaient de sommeil. Aussi un grand feu fut-il allumé, devant lequel chacun s’étendit, après s’être roulé dans sa couverture. La vive lueur de ce foyer, à l’entretien duquel Wilcox et Doniphan veilleraient tour à tour, devait suffire à tenir les fauves à distance.

Bref, il n’y eut aucune alerte et, au petit jour, tous étaient prêts à se remettre en route.

Cependant, d’avoir donné un nom au rio ne suffisait pas, il fallait le franchir, et, comme il n’était pas guéable, le halkett-boat fut mis en réquisition. Ce frêle you-you ne pouvant transporter qu’une personne à la fois, il dut faire sept fois la traversée de la rive gauche à la rive droite de Stop-river, ce qui exigea plus d’une heure. Peu importait, du moment que, grâce à lui, les provisions et les munitions ne furent point mouillées.

Quant à Phann, qui ne craignait pas de se tremper les pattes, il se jeta à la nage, et, en quelques bonds, eut passé d’un bord à l’autre.

Le terrain n’étant plus marécageux, Gordon obliqua de manière à revenir vers la rive du lac, qui fut atteinte avant dix heures. Après un déjeuner, dont quelques grillades de pécari firent les frais, on prit la direction du nord.

Rien n’indiquait encore que l’extrémité du lac fût à proximité, et l’horizon de l’est était toujours circonscrit par une ligne circulaire de ciel et d’eau, lorsque, vers midi, Doniphan, braquant sa lunette, dit :

« Voici l’autre rive ! »

Et tous de regarder de ce côté, où quelques têtes d’arbres commençaient à se montrer au-dessus des eaux.

« Ne nous arrêtons pas, répondit Gordon, et tâchons d’arriver avant la nuit ! »

Une plaine aride, ondulée de longues dunes, semée seulement de quelques touffes de joncs et de roseaux, s’étendait alors à perte de vue vers le nord. Dans sa partie septentrionale, il semblait que l’île Chairman n’offrît que de vastes espaces sablonneux, qui con-