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des milliers de grimpereaux qui ricanaient sous la feuillée, tandis que les pinsons, les alouettes, les merles chantaient ou sifflaient à pleins becs. Au loin, dans les airs, planaient des condors, des urubus et quelques couples de ces caracaras, aigles voraces qui fréquentent volontiers les parages du Sud-Amérique.

Sans doute, en souvenir de Robinson Crusoé, Service regretta que la famille des perroquets ne fût pas représentée dans l’ornithologie de l’île. S’il n’avait pu apprivoiser une autruche, peut-être l’un de ces oiseaux bavards se serait-il montré moins rebelle ? Mais il n’en aperçut pas un seul.

En somme, le gibier abondait, des maras, des pichis, et particulièrement des grouses, à peu près semblables au coq de bruyère. Gordon ne put refuser à Doniphan le plaisir de tirer un pécari de moyenne taille, qui servirait au déjeuner du lendemain, s’il ne servait pas au dîner du soir.

D’ailleurs, il ne fut pas nécessaire de s’engager sous les arbres, où la marche eût été plus pénible. Il suffisait d’en longer la lisière, et c’est ce qui fut fait jusqu’à cinq heures du soir. Le second cours d’eau, large d’une quarantaine de pieds, vint alors barrer le passage.

C’était un des exutoires du lac, et il allait se jeter dans le Pacifique, au-delà de Sloughi-bay, après avoir contourné le nord d’Auckland-hill.

Gordon résolut de s’arrêter en cet endroit. Douze milles dans les jambes, c’était assez pour un jour. En attendant, il parut indispensable de donner un nom à ce cours d’eau, et, puisqu’on venait de faire halte sur ses bords, il fut nommé Stop-river (rivière de la halte).

Le campement fut établi sous les premiers arbres de la berge. Les grouses ayant été réservées pour le lendemain, les tucutucos formèrent le plat de résistance, et, cette fois encore, Service se tira assez convenablement de ses fonctions. D’ailleurs, le besoin de dormir l’emportait sur le besoin de manger, et, si les bouches s’ou-