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deux ans de vacances.

À huit heures et demie, chacun prit place sur le radeau. Les grands se tenaient en abord, armés de gaffes ou d’espars – seul moyen qu’ils eussent de le diriger, puisqu’un gouvernail n’aurait pas eu d’action sur le courant.

Un peu avant neuf heures, la marée s’étant fait sentir, un sourd craquement courut à travers la charpente du radeau, dont les pièces jouaient dans leurs amarrages. Mais, après ce premier effort, il n’y eut plus de dislocation à craindre.

« Attention ! cria Briant.

— Attention ! » cria Baxter.

Tous deux étaient postés aux amarres, qui retenaient l’embarcation par l’avant et par l’arrière, et dont le double revenait entre leurs mains.

« Nous sommes prêts ! » cria Doniphan, lequel se tenait avec Wilcox à la partie antérieure de la plate-forme.

Après avoir constaté que le radeau dérivait sous l’action de la marée :

« Larguez ! » cria Briant.

L’ordre fut exécuté sans délai, et l’appareil, devenu libre, remonta lentement entre les deux rives, entraînant la yole qu’il avait à la remorque.

Ce fut une joie générale quand tous virent leur lourde machine en mouvement. Ils auraient construit un vaisseau de haut-bord qu’ils n’eussent pas été plus satisfaits d’eux-mêmes ! Qu’on leur pardonne ce petit sentiment de vanité !

On le sait, la rive droite, bordée d’arbres, était sensiblement plus élevée que la rive gauche, étroite berge allongée le long du marais avoisinant. En écarter le radeau parce qu’elle était peu accore et qu’il eût risqué de s’engraver, c’est à cela que Briant, Baxter, Doniphan, Wilcox et Moko appliquèrent tous leurs efforts – la profondeur de l’eau permettant de ranger sans inconvénient le bord opposé du rio.

Le radeau fut donc maintenu autant que possible près de la rive