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deux ans de vacances.

muets et immobiles devant cette inscription, si Phann, revenant sur ses pas, n’eût disparu à l’angle du contrefort.

« Ici, Phann, ici !… » cria Briant.

Le chien ne revint pas, mais ses aboiements précipités se firent entendre.

« Attention, nous autres ! dit Briant. Ne nous séparons pas, et soyons sur nos gardes ! »

En effet, on ne pouvait agir avec trop de circonspection. Peut-être une bande d’indigènes se trouvait-elle dans le voisinage, et leur présence eût été plus à craindre qu’à désirer, si c’étaient de ces farouches Indiens qui infestent les pampas du Sud-Amérique.

Les fusils furent armés, les revolvers tenus à la main, prêts pour la défensive.

Les jeunes garçons se portèrent en avant ; puis, ayant tourné le contrefort, ils se glissèrent le long de la berge resserrée du rio. Ils n’avaient pas fait vingt pas, que Doniphan se baissait pour ramasser un objet sur le sol.

C’était une pioche, dont le fer tenait à peine à un manche à demi pourri, – une pioche d’origine américaine ou européenne, non un de ces outils grossiers fabriqués par des sauvages polynésiens. Comme l’anneau de l’embarcation, elle était profondément oxydée, et nul doute que, depuis bien des années, elle eût été abandonnée en cet endroit.

Là aussi, au pied de la falaise, se voyaient des traces de culture, quelques sillons irrégulièrement tracés, un petit carré d’ignames que le défaut de soins avait ramenés à l’état sauvage.

Tout à coup, un lugubre aboiement traversa l’air. Presque aussitôt, Phann reparut, en proie à une agitation plus inexplicable encore. Il tournait sur lui-même, il courait au-devant de ses jeunes maîtres, il les regardait, il les appelait, il semblait les inviter à le suivre.

« Il y a certainement quelque chose d’extraordinaire ! dit Briant, qui cherchait vainement à calmer le chien.