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deux ans de vacances.

sans pouvoir reconnaître à quelle espèce ils appartenaient. En tout cas, ils devaient être peu redoutables, puisqu’ils se mettaient si rapidement hors de portée.

Certes la main lui démangeait, à cet impatient Doniphan, de saisir son fusil et de le décharger sur ces craintifs quadrupèdes ! Mais la raison aidant, Briant n’eut point à intervenir pour empêcher son camarade de commettre une imprudence en révélant leur présence par un coup de feu.

Cependant, si Doniphan avait compris qu’il devait imposer silence à son arme favorite, les occasions de la faire parler auraient été fréquentes. À chaque pas s’envolaient de ces perdrix de l’espèce des tinamous, d’un goût très délicat, ou d’autres de l’espèce des endromies, plus connues sous le nom de martinettes ; puis aussi, des grives, des oies sauvages, des grouses, sans compter nombre de volatiles qu’il eût été facile d’abattre par centaines.

En somme, pour le cas où l’on séjournerait dans cette région, la chasse pourrait fournir une abondante nourriture. C’est ce que Doniphan se borna à constater dès le début de l’exploration, quitte à se dédommager plus tard de la réserve que lui imposaient les circonstances.

Les essences de ces forêts appartenaient plus particulièrement aux diverses variétés des bouleaux et des hêtres qui développaient leur ramure d’un vert tendre jusqu’à cent pieds au-dessus du sol. Parmi les autres arbres figuraient des cyprès de belle venue, des myrtacées à bois rougeâtre et très dense, et des groupes magnifiques de ces végétaux, nommés « winters », dont l’écorce répand un arôme qui se rapproche de celui de la cannelle.

Il était deux heures, lorsqu’une seconde halte fut faite au milieu d’une étroite clairière traversée par un rio peu profond – ce qu’on appelle un « creek » dans l’Amérique du Nord. Les eaux de ce creek, d’une limpidité parfaite, coulaient doucement sur un lit de roches noirâtres. À voir son cours paisible et peu profond, que n’embarrassaient encore ni bois mort ni herbes en dérive, on pouvait croire que