— Cependant, pour satisfaire Maston, reprit le président, je lui dirai que les travaux d’un de nos concitoyens peuvent être rattachés à l’étude de la cellulose, car le collodion, qui est un des principaux agents de la photographie, est tout simplement du pyroxyle dissous dans l’éther additionné d’alcool, et il a été découvert par Maynard, alors étudiant en médecine à Boston.
— Eh bien ! hurrah pour Maynard et pour le fulmi-coton ! s’écria le bruyant secrétaire du Gun-Club.
— Je reviens au pyroxyle, reprit Barbicane. Vous connaissez ses propriétés, qui vont nous le rendre si précieux ; il se prépare avec la plus grande facilité ; du coton plongé dans de l’acide azotique fumant[1], pendant quinze minutes, puis lavé à grande eau, puis séché, et voilà tout.
— Rien de plus simple, en effet, dit Morgan.
— De plus, le pyroxyle est inaltérable à l’humidité, qualité précieuse à nos yeux, puisqu’il faudra plusieurs jours pour charger le canon ; son inflammabilité a lieu à cent soixante-dix degrés au lieu de deux cent quarante, et sa déflagration est si subite, qu’on peut l’enflammer sur de la poudre ordinaire, sans que celle-ci ait le temps de prendre feu.
— Parfait, répondit le major.
— Seulement il est plus coûteux.
— Qu’importe ? fit J.-T. Maston.
— Enfin il communique aux projectiles une vitesse quatre fois supérieure à celle de la poudre. J’ajouterai même que, si l’on y mêle les huit dixièmes de son poids de nitrate de potasse, sa puissance expansive est encore augmentée dans une grande proportion.
— Sera-ce nécessaire ? demanda le major.
— Je ne le pense pas, répondit Barbicane. Ainsi donc, au lieu de seize cent mille livres de poudre, nous n’aurons que quatre cent mille livres de fulmi-coton, et comme on peut sans danger comprimer cinq cents livres de coton dans vingt-sept pieds cubes, cette matière n’occupera qu’une hauteur de trente toises dans la Columbiad. De cette façon, le boulet aura plus de sept cents pieds d’âme à parcourir sous l’effort de six milliards de litres de gaz, avant de prendre son vol vers l’astre des nuits ! »
À cette période, J.-T. Maston ne put contenir son émotion ; il se jeta dans les bras de son ami avec la violence d’un projectile, et il l’aurait défoncé, si Barbicane n’eût été bâti à l’épreuve de la bombe.
Cet incident termina la troisième séance du Comité. Barbicane et ses
- ↑ Ainsi nommé, parce que, au contact de l’air humide, il répand d’épaisses fumées blanchâtres.