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— Et où va-t-il ?… et d’où vient-il… et quelle est sa profession ?…

— Personne ne le sait, j’imagine. »

Patrice s’avançait pour offrir ses services, si besoin était. Or, comme il avait entendu la série des questions posées par son maître, il crut pouvoir se permettre de dire :

« Si monsieur m’y autorise, je suis à même de le renseigner sur le passager dont il s’agit…

— Tu le connais ?…

— Non, mais j’ai appris du maître d’hôtel, qui l’avait appris par le commissionnaire de l’hôtel à Cette…

— Mets une sourdine à ta musette, Patrice, et dégoise en trois mots ce qu’il est, ce particulier-là…

— Président de la Société astronomique de Montélimar, » répondit Patrice d’un ton sec.

Un astronome, M. Eustache Oriental était un astronome. Cela expliquait la longue-vue qu’il portait en bandoulière et dont il se servait pour interroger les divers points de l’horizon, lorsqu’il se décidait à paraître sur la dunette. Dans tous les cas, il ne semblait point d’humeur à se lier avec personne.

« C’est sans doute son astronomie qui l’absorbe ! » se contenta de répondre Clovis Dardentor.

Vers une heure, Majorque montra les ondulations variées de son littoral et les pittoresques hauteurs qui le dominent.

L’Argèlès modifia sa direction afin de contourner l’île, et, sous l’abri de la terre, trouva la mer plus calme, — ce qui fit sortir nombre de passagers de leurs cabines.

Le paquebot doubla bientôt le rocher dangereux de la Dragonera, sur lequel se dresse un phare, et il donna dans l’étroite passe de Friou, entre le parement des falaises abruptes. Puis, le cap Calanguera ayant été laissé sur bâbord, l’Argèlès évolua à l’entrée de la baie de Palma, et, longeant le môle, vint s’amarrer au quai, où les curieux se pressaient en foule.