— Jusqu’à huit heures du soir, le temps d’embarquer des marchandises à destination d’Oran.
— Nous aurons tout le loisir de visiter l’île ?…
— L’île… non pas, mais la ville de Palma, qui en vaut la peine, dit-on…
— Comment… dit-on ?… Capitaine, est-ce que vous n’êtes pas déjà venu à Majorque ?…
— Trente ou quarante fois, à bien compter.
— Sans l’avoir jamais explorée ?…
— Et le temps, monsieur Lornans, et le temps ?… Est-ce que je l’ai eu ?…
— Ni le temps… ni le goût, peut-être ?…
— Ni le goût, en effet ! J’ai le mal de terre, quand je ne suis plus sur mer ! »
Et, là-dessus, le capitaine Bugarach, de quitter son interlocuteur pour monter sur la passerelle.
Marcel Lornans se retourna vers son cousin :
« Eh bien ! Jean, dit-il, tu es muet, ce matin, comme un Harpocrate ?
— C’est que je pense, Marcel.
— À quoi ?…
— À ce que je t’ai dit hier.
— Que m’as-tu dit ?…
— Que nous avions une occasion unique de nous faire adopter par ce citoyen de Perpignan.
— Tu y songes encore ?…
— Oui… après y avoir rêvé toute la nuit.
— C’est sérieux ?…
— Très sérieux… Il désire des enfants adoptifs… Qu’il nous prenne… Il ne trouvera pas mieux !
— Aussi modeste que fantaisiste, Jean !
— Vois-tu, Marcel, d’être soldat, c’est très beau ! De s’engager au 7e chasseurs d’Afrique, c’est très honorable. Pourtant, je crains bien