Page:Verne - Clovis Dardentor, Hetzel, 1900.djvu/33

Le texte de cette page a été corrigé et est conforme au fac-similé.

— Du quartier de la Banque, répondit Jean Taconnat, et, si vous tenez à ce que je précise davantage, de la rue Montmartre, numéro 133, au quatrième étage, la porte à gauche…

— Eh, messieurs, répartit le docteur Bruno, il est possible que mes questions soient indiscrètes… mais cela tient à la fonction… un médecin a besoin de tout savoir, même ce qui ne le regarde pas… Vous excuserez donc…

— Vous êtes tout excusé, » répondit Marcel Lornans.

Et alors, le docteur Bruno d’ouvrir largement les ailes de son moulin à paroles. Sa langue battait comme un claquet. Et quels gestes et quelles phrases ! racontant ce qu’il avait déjà pu apprendre des uns et des autres, riant de cette famille Désirandelle, de ce M. Dardentor qui lui avait fait faux bond, vantant d’avance le dîner qui serait excellent, assurant que l’Argèlès serait le lendemain en vue des Baléares, où il devait relâcher pendant quelques heures, relâche charmante pour les touristes ; enfin, donnant libre cours à sa garrulité naturelle, ou, pour employer un mot qui peint mieux ce flux de verbiage, à sa logorrhée chronique.

« Et, avant d’embarquer, messieurs, vous avez eu le temps de voir Cette ?… demanda-t-il en se levant.

— Non, docteur, à notre grand regret, répondit Marcel Lornans.

— C’est dommage !… La ville en vaut la peine !… Et vous avez déjà visité Oran ?…

— Pas même en rêve ! » répliqua Jean Taconnat.

Un des mousses vint, en ce moment, prévenir le docteur Bruno de se rendre près du capitaine Bugarach. Le docteur Bruno quitta les deux amis, non sans les accabler de nouvelles politesses, et se promettant de renouer une conversation où il lui restait tant de choses à apprendre.

Ce qu’il n’avait pas appris, relativement au passé et au présent de ces deux jeunes gens, il convient de le résumer en quelques succinctes lignes.

Marcel Lornans et Jean Taconnat étaient cousins germains par