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M. Dardentor eût consenti à en verser le double ou le triple pour aller plus vite.

Bref, le jour de la cérémonie arriva, et la fête annoncée eut lieu dans le grand salon de l’hôtel. La salle à manger de Mme  Elissane n’aurait pu contenir les invités. Là se retrouvèrent Jean Taconnat, Marcel Lornans, les amis, les connaissances, et même M. Eustache Oriental, de retour à Oran, et auquel notre Perpignanais avait adressé une invitation épulatoire, qui fut accueillie comme elle le méritait.

Mais, à l’extrême surprise des uns et à l’extrême satisfaction des autres, les Désirandelle ne figuraient point au nombre des convives. Non ! depuis la veille, décontenancés, furieux, maudissant M. Dardentor jusque dans les générations les plus éloignées qui formeraient les descendants de sa fille adoptive, ils étaient partis à bord de l’Argèlès, où le capitaine Bugarach et le docteur Bruno n’eurent point à se ruiner pour eux en nourriture, car Agathocle lui-même en avait perdu l’appétit.

Est-il nécessaire de dire que le repas fut magnifique, plein d’entrain et de bonne humeur, que Marcel Lornans y retrouva Louise Elissane dans tout l’éclat de sa beauté, que Jean Taconnat avait fait une complainte sur le départ du « Petit Gagathocle », mais qu’il n’osa la chanter par convenance, que M. Eustache Oriental, attablé jusqu’aux oreilles, mangea de tout, mais avec modération, et qu’il but de tout, mais avec discrétion.

Oui ! elle fut splendide et remarquable, l’allocution de M. Dardentor avant le dessert. Combien les Désirandelle avaient été bien inspirés en s’embarquant la veille, et quelle mine auraient-ils faite à cet instant solennel…

« Mesdames et messieurs, je vous remercie d’avoir bien voulu prendre part à cette cérémonie qui vient de couronner le plus cher de mes désirs. »

Patrice put espérer, par le début, que ce laïus s’achèverait d’une façon convenable.