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ne s’en plaindront pas. Je vous prie seulement de me dire s’il y a des bazars à Kokhan ?

— Une ville turkestane sans bazars, ce serait Londres sans docks ! répond le major.

— Et Paris sans théâtres ! s’écrie le trial.

— Oui, Kokhan possède des bazars, l’un, entre autres, sur le pont du Sokh, dont les deux bras traversent la ville, et dans lequel les plus beaux tissus de l’Asie se payent en tillahs d’or, qui valent trois roubles et soixante kopeks de notre monnaie.

— Je suis sûr, major, que vous allez me parler des mosquées après les bazars…

— Sans doute.

— Et des médressés ?…

— Assurément, monsieur le reporter ; mais ce sera pour vous apprendre que ces monuments ne valent ni les médressés ni les mosquées de Samarkande ou de Boukhara. »

J’ai mis à profit la complaisance du major Noltitz, et, grâce à lui, les lecteurs du XXe Siècle ne passeront point pendant la nuit à Kokhan. Je laisserai ma plume inonder de rayons solaires cette cité, dont je ne dois entrevoir que la vague silhouette.

Le dîner se prolonge assez tard, et se termine d’une façon inattendue par l’offre que nous fait l’aimable M. Caterna de « réciter un monologue ».

Je laisse à penser si l’offre fut acceptée avec empressement.

Notre train ressemble de plus en plus à une petite ville roulante. Elle a même son casino, ce dining-car où nous sommes réunis en ce moment. Et c’est ainsi que, sur la partie orientale du Turkestan, à quatre cents kilomètres du plateau de Pamir, au dessert d’un excellent repas servi dans un salon du Grand-Transasiatique, l’Obsession fut dite, avec un talent très fin, par M. Caterna, grand premier comique engagé au théâtre de Shangaï pour la saison prochaine.

« Monsieur, lui dit Pan-Chao, tous mes compliments bien sincères. J’ai déjà entendu Coquelin cadet…