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De ce point, par une rue étroite mais rectiligne, notre arba arrive sur la place du Righistan, « qu’il ne faut pas confondre avec la place du même nom à Boukhara, » fait observer naïvement ma brochure.

Beau quadrilatère, peut-être un peu gâté par ce fait que les Russes l’ont agrémenté de pavés et orné de candélabres, — ce qui plaira certainement à Fulk Ephrinell, s’il se décide à visiter Samarkande. Sur trois côtés de cette place se dressent les ruines bien conservées de trois médressés, où les « mollahs » donnent aux enfants une instruction très complète. Ces médressés, — on compte dix-sept de ces collèges à Samarkande et quatre-vingt-cinq mosquées, — ces médressés s’appellent Tilla-Kari, Chir-Dar et Oulong-Beg. D’une façon générale, on peut dire qu’ils se ressemblent : portique au centre, conduisant aux cours intérieures, murs en briques émaillées, teintes de jaune pâle et de bleu tendre, arabesques dessinées en lignes d’or sur fond de bleu turquoise, la couleur dominante, minarets inclinés qui menacent de tomber et ne tombent jamais, heureusement pour leur revêtement d’émail, que l’intrépide voyageuse Mme de Ujfalvy-Bourdon déclare très supérieur à celui de nos plus beaux émaux craquelés. Et il ne s’agit pas là d’un vase à mettre sur une cheminée ou sur un socle, mais de minarets de belle hauteur.

Ces merveilles sont encore en l’état où les trouva Marco-Polo, le voyageur vénitien du XIIIe siècle.

« Eh bien, monsieur Bombarnac, demande le major, n’admirez-vous pas cette place du Righistan ?

— Elle est superbe ! dis-je.

— Oui, répond notre trial, et quel magnifique décor pour un ballet, Caroline ! Cette espèce de mosquée au côté jardin, et cette autre au côté cour…

— Tu as raison, Adolphe, dit la dugazon, mais peut-être faudrait-il redresser les tours pour la régularité, et planter au milieu des fontaines lumineuses…

— Excellente idée, Caroline ! Voyons, faites-nous un drame, mon-