Page:Verne - César Cascabel, 1890.djvu/406

Le texte de cette page a été corrigé et est conforme au fac-similé.
393
voyage terminé et qui n’est pas fini.

verser une somme énorme sous peine d’être dénoncé à la police moscovite… On attendrait qu’il fût arrivé à Perm… Ni Ortik ni Kirschef ne paraîtraient dans cette affaire, afin de garder leur situation, pour le cas où elle échouerait… Ce seraient leurs compagnons qui préviendraient M. Serge par une lettre, lui demandant une entrevue, etc.

M. Cascabel ne parvenait que très difficilement à contenir son indignation, pendant qu’il écoutait le récit de Kayette. De pareils coquins, auxquels il avait rendu tant de services, qu’il avait délivrés, nourris, rapatriés ?… Eh bien, c’était là un joli cadeau, une belle restitution qu’il faisait à l’empire du Czar !… Si, encore, ils eussent été Anglais, il aurait moins de regret de les rendre à l’Angleterre !… Ah ! les misérables !… Ah ! les gueux !

« Et maintenant, monsieur Cascabel, demanda Kayette, qu’allez-vous faire ?

— Ce que je vais faire ?… C’est très simple, petite Kayette !… Je vais dénoncer Ortik et Kirschef au premier poste de Cosaques que nous rencontrerons, et ils seront pendus…

— Réfléchissez, monsieur Cascabel, reprit la jeune fille. Vous ne pouvez faire cela !

— Et pourquoi ?…

— Parce qu’Ortik et Kirschef n’hésiteront pas à dénoncer le comte Narkine, et, avec lui, ceux qui lui ont donné les moyens de rentrer en Russie !

— Au diable ce qui me concerne ! s’écria M. Cascabel. S’il n’y avait que moi !… Mais, monsieur Serge, c’est autre chose !… Tu as raison, Kayette, il faut réfléchir !… »

Et, alors, très agité, très perplexe, il fit quelques pas, se frappant du poing la tête pour en dégager une idée… Puis, revenant vers la jeune fille :

« Tu m’as dit, demanda-t-il, que l’intention d’Ortik était d’attendre notre arrivée à Perm pour faire agir ses complices ?…

— Oui, monsieur Cascabel, et il leur a bien recommandé de ne