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les monts ourals

en laissant échapper un gros soupir. Mais comment remplacer notre attelage ?…

— Je vais me rendre au plus prochain village, où je me procurerai des chevaux, en les payant un bon prix, répondit M. Serge. Si Ortik peut me servir de guide…

— Nous partirons quand vous voudrez, monsieur Serge, répondit Ortik.

— Évidemment, ajouta M. Cascabel, il n’y a pas autre chose à faire. »

Et c’est ce qui eût été fait dès le jour même, si, à l’étonnement général, on n’eût vu paraître deux rennes sur le bord de la clairière, vers huit heures du matin.

Ce fut Sandre qui les signala.

« Père !… Père !… s’écria-t-il. Les voilà !… Ils reviennent !…

— Vivants ?…

— En tout cas, ceux-là n’ont pas l’air d’avoir été dévorés, puisqu’ils marchent…

À moins, répliqua Clou, qu’il ne leur soit resté des jambes !…

— Ah ! les bonnes bêtes !… s’écria Napoléone. Il faut que je les embrasse ! »

Et, après avoir couru vers les deux rennes, elle leur passa les bras autour du cou, et les embrassa de bon cœur.

Mais deux rennes n’auraient pas été capables de traîner la Belle-Roulotte. Par bonheur, plusieurs autres se montrèrent à la lisière du bois. Une heure plus tard, il y en avait quatorze sur les vingt, qui étaient venus de l’archipel des Liakhov.

« Vivent les rennes ! » s’écria ce gamin de Sandre, sans que ce cri n’eût rien de monarchique, bien entendu.

Il ne manquait plus que six de ces animaux. C’étaient ceux que les loups avaient attaqué avant qu’ils n’eussent pu rompre leurs entraves, et dont on retrouva les restes aux abords de la clairière. Les quatorze autres avaient pris la fuite dès le début de l’attaque, et c’était l’instinct qui les avait ramenés au campement.