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césar cascabel.

occupés à l’exploitation des mines. Toutefois, en franchissant ces défilés grandioses, la troupe de M. Cascabel n’avait point à redouter les postes militaires, puisque ses papiers étaient en règle. Et même, si elle eût abordé les monts Oural dans leur partie médiane, elle n’aurait pas hésité à suivre la belle route d’Iekaterinbourg, l’une des plus fréquentées de la chaîne, afin de déboucher sur le gouvernement de ce nom. Mais, puisque l’itinéraire d’Ortik l’avait amenée plus au nord, mieux valait suivre la passe de la Petchora, et redescendre ensuite jusqu’à Perm.

C’est ce qui allait être fait dès le lendemain.

Lorsque le jour fut venu, on put constater combien la masse des assaillants avait été considérable. S’ils étaient parvenus à forcer l’intérieur de la Belle-Roulotte, pas un de ses hôtes n’eût survécu au carnage.

Une cinquantaine de loups étaient étendus sur le sol — de ces loups de grande taille, si redoutables aux voyageurs engagés à travers la steppe. Les autres avaient pris la fuite, détalant comme s’ils avaient eu le diable au corps — métaphore absolument justifiée cette fois. Quant aux deux bêtes flambées, on les retrouva à quelque cents pas de la clairière.

Et, maintenant, une question se posait : à l’entrée de ce défilé de la Petchora, la Belle-Roulotte était fort éloignée de ces zavodys, qui sont rares sur le versant oriental de l’Oural.

« Comment ferons-nous ?… demanda Jean. Notre attelage de rennes est en fuite…

— S’il n’était qu’en fuite, répondit M. Cascabel, il ne serait peut-être pas impossible de le retrouver ! Mais il est probable que nos rennes auront été dévorés !

— Pauvres bêtes ! dit Napoléone. Je les aimais comme j’aimais Vermout et Gladiator…

— Qui auraient péri sous la dent des loups, s’ils ne s’étaient pas noyés là-bas ! ajouta Sandre.

— Oui !… C’est bien ce qui leur serait arrivé !… dit M. Cascabel,