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césar cascabel.

Et, à ce propos, comme M. Serge dit un jour qu’il serait peut-être prudent de les remplacer par des chevaux, dès que l’on pourrait s’en procurer :

« Les remplacer ?… répondit M. Cascabel. Et pourquoi, s’il vous plaît ? Croyez-vous donc que ceux-ci n’auront pas la force de nous mener jusqu’en Russie ?

— Si nous nous dirigions vers la Russie septentrionale, répondit M. Serge, je ne m’en préoccuperais pas, mais la Russie centrale, c’est autre chose. Ces animaux ne supportent que très difficilement la chaleur, elle les épuise et les rend incapables de tout travail. Aussi, vers la fin d’avril, voit-on de nombreuses troupes de rennes regagner les territoires du nord, et principalement les hauts plateaux de l’Oural, toujours couverts de neiges.

— Eh bien ! nous nous déciderons, monsieur Serge, lorsque nous aurons atteint la frontière. Et, vraiment, nous séparer de cet attelage sera un grand sacrifice ! Jugez un peu de l’effet, si j’arrivais en pleine foire de Perm avec vingt rennes, attelés au char de la famille Cascabel !… Quel effet, et quelle réclame !

— Ce serait évidemment magnifique, répondit M. Serge en souriant.

— Triomphal !… Dites triomphal !… Et, à ce propos, ajouta M. Cascabel, il est bien convenu, n’est-ce pas, que le comte Narkine fait partie de ma troupe, et qu’au besoin, il ne refusera point de travailler devant le public ?…

— C’est convenu.

— Alors ne négligez pas vos leçons d’escamotage, monsieur Serge. Comme on croit que vous apprenez pour votre plaisir, ni mes enfants ni les deux matelots ne peuvent s’en étonner. Eh !… savez-vous que vous êtes déjà très adroit !

— Comment ne le serais-je pas, ami Cascabel, avec un professeur tel que vous !

— Demande bien pardon, monsieur Serge, mais je vous assure que vous avez des dispositions naturelles très remarquables !… Avec un