C’était la première fois que les dieux de la Nouvelle-Sibérie daignaient converser avec leurs adorateurs.
Et alors une seconde voix, plus accentuée — une voix de commandement —, s’échappe du bec de l’idole plantée à gauche, et dit en vibrant :
« Ya tibié prikajou étote arrestantof otpoustite. Tvoïe narode doljne dlia ikhe same balchoïé vajestvo imiéte i nime addate vcié vieschtchi katori ou ikhe bouili vziati. Ja tébié prikajou ou siberskoïe beregou ikhe lioksché vosvraticia. »
Trois phrases qui peuvent se traduire ainsi, et dont les injonctions s’adressent bien à Tchou-Tchouk :
« Ordre à toi de mettre ces prisonniers en liberté ! Ordre à ton peuple d’avoir pour eux les plus grands égards, de leur rendre tous les objets dont ils ont été dépouillés ! Ordre de leur faciliter le retour à la côte sibérienne ! »
Ce ne fut plus de la stupéfaction, cette fois, ce fut de l’épouvante. Tchou-Tchouk s’était redressé sur ses genoux tremblants, l’œil hagard, la bouche béante, les doigts écartés, dans le paroxysme de l’hébétement. Les indigènes s’étaient à demi relevés, ils ne savaient s’ils devaient se prosterner ou prendre la fuite !
Enfin la troisième divinité, celle du milieu, prend la parole à son tour. Mais que sa voix est terrible, pleine de colère, grosse de menaces ! Et avec quelle vigueur tragique elle articule les syllabes, et les fait gronder comme les roulements de la foudre !
Or, voici les paroles qu’elle prononça, en visant directement Sa Majesté néo-sibérienne :
« Jesle ti take nié sdiélèle élote tojet same diène, kakda èti sviati tchéloviéki boudoute jélaïte, tchorte s’tvoïé oblacte ! »