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les îles liakhoff.


« A-t-il assez l’air d’un vieux roublard ! » murmura M. Cascabel.

À ses côtés se tenaient deux ou trois notables de la tribu. Au-dehors attendaient une cinquantaine d’indigènes, à peu près vêtus de la même façon que leur chef, et dont on ne pouvait reconnaître le sexe sous ces vêtements identiques que portent les hommes et les femmes de la Nouvelle-Sibérie.

Et, tout d’abord, Tchou-Tchouk, s’adressant à M. Serge, dont il avait, sans doute, deviné la nationalité, lui dit en un langage russe très compréhensible :

« Qui êtes vous ?…

— Un sujet du Czar ! répondit M. Serge, pensant que ce titre impérial imposerait peut-être à ce souverain d’archipel.

— Et ceux là ?… reprit Tchou-Tchouk, qui désignait les membres de la famille Cascabel.

— Des Français ! répondit M. Serge.

— Des Français ?… » répéta le chef.

Et il semblait qu’il n’avait jamais entendu parler d’un peuple ou d’une peuplade de ce nom.

« Eh bien, oui !… des Français… des Français… de France, canaille ! » s’écria M. Cascabel.

Mais il dit cela dans sa propre langue, et avec la liberté de parole d’un homme qui est sûr de ne point être compris.

« Et celle-là ?… demanda Tchou-Tchouk, en montrant Kayette, car il ne lui avait point échappé que la jeune fille devait être de race étrangère.

— Une Indienne ! » répondit M. Serge.

Et alors une conversation assez animée s’engagea entre Tchou-Tchouk et lui — conversation dont M. Serge traduisait les principaux passages à la famille Cascabel.

En définitive, le résultat de cet entretien fut que les naufragés devaient se considérer prisonniers et qu’ils resteraient sur l’île Kotelnyï, tant qu’ils n’auraient pas payé en bon argent russe une rançon de trois mille roubles.