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césar cascabel.

— Oh ! fit-elle, je ne crains pas le froid, et on y est accoutumé dans la vallée du Youkon !

— N’importe, Kayette !

— Jean a raison, dit M. Cascabel en intervenant. Va t’envelopper d’une bonne couverture, ma petite caille. D’ailleurs, je te préviens que si tu t’enrhumes, c’est moi qui me charge de te guérir, et cela sera terrible !… J’irai, s’il le faut, jusqu’à te couper la tête pour t’empêcher d’éternuer !… »

Devant une pareille menace, la jeune Indienne n’avait qu’à obéir, et c’est ce qu’elle fit.

Puis, chacun s’occupa d’organiser la halte. Ce fut très simple, en somme. Pas de bois à couper dans la forêt, faute de forêt, pas de foyer à allumer, faute de combustible, pas même d’herbe à recueillir pour le repas des animaux. La Belle-Roulotte était là, offrant à ses hôtes son confort habituel, sa bonne température, ses couchettes toutes dressées, sa table toute servie, son hospitalité permanente.

Il ne fut nécessaire que de pourvoir à la nourriture de Vermout et de Gladiator avec une portion de fourrage apporté de Port-Clarence. Cela fait, on enveloppa les deux chevaux d’épaisses couvertures, et ils n’eurent plus qu’à se reposer jusqu’au lendemain. Le perroquet dans sa cage, le singe dans sa banne, ne furent point oubliés, non plus que les deux chiens, très friands de cette viande sèche dont ils se nourrissaient à belles dents.

Enfin, après avoir pris soin des bêtes, M. Serge et ses compagnons soupèrent ou, ce qui est plus juste, vu l’heure peu avancée, dînèrent de bon appétit.

« Eh !… Eh !… s’écria M. Cascabel, c’est peut-être la première fois que des Français font un repas aussi bien servi au milieu du détroit de Behring !

— C’est probable, répondit M. Serge. Mais, avant trois ou quatre jours, je compte que nous pourrons nous retrouver à table — en terme ferme cette fois !