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l’épave du cynthia.

détourner… Je n’ai pas à vous rappeler, maaster Hersebom, qu’évidemment votre fils adoptif appartient à une famille riche et distiguée. Voulez-vous que je m’expose, si je la retrouve, à lui rendre un enfant élevé au village et dépourvu de cette éducation sans laquelle il serait déplacé dans son nouveau milieu ?… Ce ne serait pas raisonnable, vous avez trop de bon sens pour ne pas le comprendre… »

Maaster Hersebom baissait la tête. Sans qu’il s’en aperçût, deux grosses larmes coulaient sur ses joues hâlées.

« Mais alors, dit-il, ce serait une séparation définitive !… Avant même de savoir si le petit retrouvera une autre famille, il faudrait le chasser de la maison !… C’est trop me demander, monsieur le docteur, trop demander à ma femme !… L’enfant est heureux chez nous !… Pourquoi ne pas l’y laisser — au moins tant qu’il ne sera pas sûr d’un sort plus brillant ?

— Heureux !… Qui vous dit qu’il le sera plus tard ?… Qui vous répond que, devenu grand, il ne regrettera pas d’avoir été sauvé ! Intelligent, supérieur comme il sera peut-être, il étouffera dans la vie que vous pouvez lui faire à Noroë, mon cher Hersebom !…

— Ma foi, monsieur le docteur, cette vie que vous dédaignez est assez bonne pour nous !… Pourquoi pas aussi pour le petit ?

— Je ne la dédaigne pas ! s’écria le savant avec