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coups de canon

l’Alaska. Il se trouva étreint par l’arrière et se souleva avec des craquements terribles, en plongeant son avant dans le gouffre comme s’il allait s’y abîmer. Il y eut une panique. Tout le monde se précipita sur le pont. Quelques hommes crurent le moment venu de chercher un refuge sur la banquise, et, sans attendre le signal de leurs chefs, enjambèrent les bastingages.

Quatre ou cinq de ces malheureux parvinrent à sauter sur la neige. Deux autres se trouvèrent pris entre l’amas de glaces qui entourait le navire et le bordage de tribord, au moment même où, reprenant son équilibre, l’Alaska se redressait en gémissant.

Leurs cris de douleur et le bruit de leurs os broyés se perdirent dans l’ouragan.

L’accalmie vint et le navire resta immobile.

La leçon était tragique. Erik en prit texte pour recommander à l’équipage de garder son sang-froid, et, en toute occasion, d’attendre des ordres positifs.

« Vous le comprenez, dit-il à ses compagnons, le débarquement est une mesure suprême, à laquelle nous ne pouvons recourir qu’à la dernière extrémité. Tous nos efforts doivent tendre à sauver l’Alaska ! Si nous ne l’avions plus, notre situation serait étrangement précaire sur la banquise ! C’est seulement en cas où le navire deviendrait intenable qu’il faudrait l’évacuer. Il importe, en tout cas, au plus haut point qu’un tel mouvement