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l’épave du cynthia.

peu près aussi bons marcheurs l’un que l’autre. L’intervalle qui les séparait resta le même pendant plusieurs heures.

Toutefois, c’était au prix d’une énorme dépense de charbon — denrée qui devenait de plus en plus rare à bord de l’Alaska —, et il y avait à craindre que cette dépense ne fût en pure perte, si la nuit arrivait sans qu’on eût pu atteindre l’Albatros. Erik ne se jugea pas en droit de jouer cette dernière carte, sans consulter son équipage. Il le fit monter sur le pont et exposa franchement la situation.

« Mes amis, dit-il, vous savez de quoi il s’agit, de voir si nous prendrons, pour le livrer à la justice maritime, le scélérat qui a tenté de nous faire périr sur la Basse-Froide — ou si nous lui permettrons de s’échapper ! C’est à peine s’il nous reste du charbon pour six jours pleins. Toute déviation de route nous expose donc à finir notre voyage à la voile, ce qui peut même en compromettre le succès. D’autre part, l’Albatros compte sûrement sur la nuit pour nous mettre en défaut. Il sera essentiel de le garder dans le rayon de notre projecteur électrique et de ne pas ralentir un instant notre marche. Nous sommes sûrs, d’ailleurs, que cette course aura un terme obligé, soit demain soit le jour suivant, à la barrière de glaces éternelles qui défend les approches du pôle vers le 78e ou le 79e degré. Mais je n’ai pas voulu continuer cette poursuite sans vous demander si vous l’ap-