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l’épave du cynthia.

toute l’étendue des mers était ouverte à l’Albatros ! Comment deviner vers quel point de la rose des vents il emportait O’Donoghan et son secret ?

Voilà ce que se disait le commandant de l’Alaska en se promenant sur la dunette, après avoir donné l’ordre de mettre le cap à l’ouest. Et à ces pensées douloureuses se mêlaient quelques remords d’avoir souffert que ses amis partageassent avec lui les dangers et les fatigues de cette inutile expédition ! Deux fois inutile, puisque Tudor Brown avait retrouvé Nordenskjöld avant l’Alaska, comme il avait précédé l’expédition suédoise à l’île Ljakow ! On allait donc rentrer à Stockholm — si l’on y rentrait — sans avoir atteint aucun des objets du voyage. C’était en vérité trop de malchance !… Ah ! du moins, que le retour servît à quelque chose et fût la contre-épreuve du voyage de la Véga. Que le passage nord-est restât consacré par une seconde expérience !… À tout prix il fallait atteindre le cap Tchéliouskine et le doubler de l’est à l’ouest ! À tout prix, il fallait revenir en Suède par la mer de Kara !

C’est donc vers ce redoutable cap Tchéliouskine, naguère encore réputé infranchissable, que l’Alaska voguait maintenant à toute vapeur. L’itinéraire qu’il suivait n’était pas exactement celui de la Véga, partie de l’embouchure de la Lena, où elle avait relâché pour se rendre à l’île Ljakow. Erik n’avait aucune raison de redescendre à la côte sibérienne. Laissant à tribord les îles Stolbovoï et Seme-