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le plus court chemin.

grappes de neige qui s’abîment soudain et s’éteignent dans l’eau comme une flamme qui grésille ? Qui pourrait se figurer les splendides cascades qui ruissellent de tous côtés, les soulèvements d’écume produits par leur chute, l’effroi comique des oiseaux de mer en train de dormir sur un radeau de glace, et qui, perdant tout à coup leur point d’appui, s’envolent en tournoyant pour aller bientôt se poser derechef sur quelque autre ?… Et, le matin, quelle bizarre fantasmagorie, quand le soleil, avec sa brillante auréole de cirrus, perce subitement le brouillard, laissant voir d’abord un petit pan de ciel bleu, qui va peu à peu s’agrandissant, et semble poursuivre, jusqu’aux limites de l’horizon, les nuées vaporeuses emportées dans une folle déroute ? »

Ces spectacles et tous ceux que présentent les mers glaciales, Erik et ses amis purent les contempler à loisir en quittant la côte du Groenland, qu’ils avaient longée jusqu’à la hauteur d’Upernavik, pour se diriger ensuite vers l’ouest, et traverser la mer de Baffin dans toute sa largeur. Ici les difficultés devinrent plus sérieuses, car cette mer est le grand chemin des glaces polaires, entraînées par les innombrables courants qui y débouchent. L’Alaska avait presque incessamment à se frayer une voie à travers d’immenses champs de glace. Par moments, il se trouvait arrêté devant des barrières insurmontables qu’il fallait tourner, ne pouvant les rompre. Ou bien il était assailli par