Page:Verne, Laurie - L’Épave du Cynthia.djvu/10

Le texte de cette page a été corrigé et est conforme au fac-similé.

4
l’épave du cynthia.

stature de cinq pieds trois pouces ? À peine sa tête grise arrivait-elle à l’épaule de M. Malarius. Et pourtant M. Malarius était déjà voûté par l’âge. Mais il était bien plus maigre que le docteur, ce qui le faisait paraître deux fois plus grand. Sa vaste houppelande marron, à laquelle un long usage avait donné des tons verdâtres, flottait sur lui comme un drapeau sur sa hampe. Il était en culottes courtes et souliers à boucles, avec un bonnet de soie noire d’où s’échappaient quelques mèches de cheveux blancs. Sa figure rose et souriante respirait la douceur la plus parfaite. Lui aussi, il portait des lunettes, qui ne vous transperçaient pas comme celles du docteur, et à travers lesquelles ses yeux bleus semblaient contempler toutes choses avec une bienveillance inépuisable.

De mémoire d’écolier, M. Malarius n’avait puni un de ses élèves. Ce qui ne l’empêchait pas d’être respecté à force d’être aimé. C’était un si brave cœur, et tout le monde le savait si bien ! On n’ignorait pas, à Noroë, qu’en sa jeunesse, il avait passé de brillants examens, et que, lui aussi, il aurait pu prendre des grades, devenir herr professor dans une grande université, conquérir honneurs et fortune. Mais il avait une sœur, la pauvre Kristina, toujours malade et souffreteuse. Et, comme elle n’aurait voulu pour rien au monde quitter son village, comme elle avait peur de la ville et craignait d’y mourir, M. Malarius s’était tout doucement sacrifié. Il avait accepté les rudes