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peu considérables. On peut également, par conséquent, observer et étudier dans les formes vivantes non leur variabilité, mais leur extraordinaire stabilité. Il se peut même que cette stabilité des formes des espèces au cours de millions d’années, de millions de générations, soit le trait le plus caractéristique des formes vivantes et mérite la plus profonde attention du biologue.

Ces phénomènes purement biologiques sont probablement la manifestation de l’immutabilité de la vie considérée dans son essence au cours de toute l’histoire géologique, immutabilité qui, sous une autre forme, est révélée par son rôle dans le mécanisme de la biosphère.

Cette stabilité des espèces mériterait, semble-t-il, d’attirer plus l’attention du biologue qu’elle ne le fait à l’heure actuelle.

La pensée du biologue contemporain s’est orientée d’un autre côté. L’évolution des formes au cours des temps géologiques paraît être le trait le plus saillant de l’histoire de la vie, il embrasse pour nous toute la nature vivante.

Ce phénomène a été constaté empiriquement et d’une façon absolument rigoureuse, il y a cent ans, par G. Cuvier, naturaliste des plus profonds et des plus précis, qui a démontré l’existence d’un autre univers, que nous ignorions, à une époque géologique antérieure. Cette constatation a provoqué du vivant de A. Wallace et de C. Darwin, et plus tard, un changement radical de toute la conception de l’univers scientifique des naturalistes. L’évolution des espèces occupe la place centrale dans cette conception et attire l’attention au point de faire oublier d’autres phénomènes biologiques aussi importants, si ce n’est davantage.

La notion de l’évolution des espèces occupe une telle place dans la pensée scientifique qu’un nouveau phé-