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formation de l’écume marine ou de l’écume de toute autre eau naturelle ; les pellicules irisées qui recouvrent d’une façon continue les surfaces aquatiques de centaines de milliers, de millions de kilomètres carrés ; ce sont eux qui colorent les fleuves et les lacs marécageux et ceux des toundras, les fleuves noirs et bruns des régions tropicales et subtropicales. Aucun organisme n’est exempt de ces composés organiques, non seulement l’habitant de ces eaux, mais la couche verte elle-même de la terre ferme, dans laquelle ils pénètrent continuellement avec les pluies et les rosées, et surtout avec les solutions du sol.

La quantité des corps organiques dissous partiellement, en dispersion colloïdale, dans les eaux naturelles, oscille entre 10−6 et 10−2 pour 100. En moyenne leur masse brute est très voisine de leur pourcentage dans l’eau de mer, autrement dit répond à 1018 à 1020 tonnes. Cette quantité semble surpasser la masse de la matière vivante.

La notion de leur importance pénètre lentement la pensée scientifique contemporaine. Déjà, chez les naturalistes anciens, on se heurte souvent à l’interprétation (à un point de vue parfois inattendu) de ce phénomène grandiose.

Dans les années 1870-80, le naturaliste génial R. Mayer a signalé dans une brève notice le rôle important de ces corps dans la composition des eaux médicinales et dans l’économie générale de la nature. L’étude de la genèse des minéraux vadoses et phréatiques prête à ce rôle un caractère encore plus profond et marquant qu’il ne l’avait supposé.


94. — Mais la genèse biochimique des corps de la nature brute, indispensable à l’existence des organismes autotrophes, ne rend pas moins considérable la différence qui les distingue des organismes hétéro-