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leur vie est plus complexe qu’il ne paraît au premier abord, mais il semble que le classement proposé par W. Pfeffer corresponde à un fait essentiel de toute la nature vivante.

Il n’est pas d’organisme qui ne soit lié, ne fût-ce que partiellement, à la matière brute par sa respiration et son alimentation. La séparation des organismes autotrophes des autres matières vivantes est fondée sur leur indépendance de cette matière, en ce qui concerne tous les éléments chimiques ; ils peuvent les puiser tous dans le milieu ambiant, brut, inanimé.

Ils puisent les éléments nécessaires à la vie de molécules déterminées, de composés d’éléments.

Mais en fin de compte, un grand nombre de molécules renfermées dans le milieu de la biosphère, molécules nécessaires à la vie, sont elles-mêmes, le produit de celle-ci, et en son absence ne se trouveraient pas dans le milieu brut. Tels par exemple l’oxygène libre O2 en totalité, et en grande partie presque tous les gaz tels que CO2, NH3, H2S, etc. Le rôle de la vie dans la genèse des solutions aqueuses naturelles n’est pas moins important. Or, les phénomènes de l’alimentation et de la respiration sont indissolublement liés à ces solutions aqueuses. C’est l’eau naturelle et non l’eau chimiquement pure, qui est aussi nécessaire à la vie que l’échange gazeux.

Eu égard à cette action profonde de la vie sur le caractère des corps chimiques de la matière brute dans le milieu de laquelle la vie se manifeste, il importe d’indiquer les limites de l’indépendance des organismes autotrophes par rapport à la vie. On n’a pas le droit d’en tirer cette conclusion logique, très courante, que les organismes autotrophes d’aujourd’hui pourraient exister seuls sur notre planète. Ils ont non seulement toujours été engendrés par des organismes autotrophes, pareils à eux-mêmes, mais ils ont puisé les éléments