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Au point de vue chimique, leur autonomie se manifeste nettement, en ce que leurs composés chimiques ne peuvent se former en dehors d’eux dans les conditions habituelles du milieu brut inanimé de la biosphère ; pénétrant dans les conditions de ce milieu, ils deviennent inévitablement instables, s’y décomposent, passent dans d’autres corps et deviennent ainsi des perturbateurs de son équilibre et source d’énergie libre pour ce milieu inanimé.

Ces composés chimiques se forment dans la matière vivante suivant des conditions souvent très différentes de celles qu’on observe dans la biosphère. On n’observe jamais dans celle-ci de décomposition des molécules d’acide carbonique et d’eau, un des processus biochimiques fondamentaux. Ce processus ne peut se produire dans notre planète que dans les régions profondes de la magmosphère, en dehors de notre biosphère. Nous ne pouvons le reproduire dans nos laboratoires qu’à des températures très élevées, qui n’existent pas dans la biosphère. Le champ thermodynamique de la matière vivante est nettement différent de celui de la biosphère, bien qu’il soit impossible d’expliquer son existence autonome. C’est un fait fondamental que les organismes vivants peuvent être décrits empiriquement comme des champs thermodynamiques particuliers, étrangers à la biosphère, isolés en cette dernière, de proportions comparativement insignifiantes, porteurs de l’énergie du rayon solaire et créés par ce rayon dans son sein. Leurs dimensions varient entre n × 10−12 et n × 103 centimètres carrés.

De quelque façon qu’on explique leur existence et leur formation dans la biosphère, le fait du changement de tous les équilibres chimiques dans ce milieu en leur présence demeure certain. Les lois générales des équilibres restent immuables et l’action des êtres