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cueillies ou arbitrairement intentées puissent devenir un prétexte d’attenter à la liberté des citoyens.

L’Assemblée constituante, suivant en cela l’exemple de l’Angleterre, ne s’était pas contentée d’instituer un jury de jugement : elle avait encore institué un jury d’accusation ou d’instruction, institution beaucoup plus essentielle encore que celle du jury de jugement, car elle devait rendre impossible tous les abus de la détention préventive.

Cette institution du jury d’accusation devait empêcher que la liberté des citoyens ne fût livrée à la merci d’un juge d’instruction, qui puisse détenir un citoyen innocent pendant des semaines et des mois, sous le prétexte d’une accusation imaginaire ; qui puisse prolonger indéfiniment l’instruction d’une affaire et aggraver ainsi d’une façon tout à fait arbitraire la situation de l’accusé[1] ; qui, maître absolu de la personne de l’accusé pendant cette détention préventive, puisse lui infliger de

  1. Il n’appartient qu’aux lois, dit Beccaria, de fixer l’espace de temps que l’on doit employer à la recherche des preuves du délit. Si le juge avait ce droit, il serait législateur. » Le juge d’instruction a ce droit en France, et il peut prolonger aussi longtemps qu’il lui plaît la détention préventive d’un prévenu, sans encourir aucune responsabilité, alors même que l’innocence éclatante du détenu serait postérieurement reconnue et constatée.